Acheter ou louer : les clefs pour prendre la bonne décision.
Acheter ou louer : les clefs pour prendre la bonne décision.
Acheter ou louer : les clefs pour prendre la bonne décision.
Etre propriétaire de sa résidence principale reste un rêve pour beaucoup de Français. Acheter plutôt que de louer relève de l'affectif, mais est-ce économiquement justifié ? Les clefs pour décider…
Retour sur une question cruciale : faut-il être propriétaire ou locataire de sa résidence principale ? Autrement dit, est-il préférable de rester locataire et d'épargner ou de devenir propriétaire en remboursant un crédit ?
Les arguments en faveur de l'achat ont la vie dure : sécurité du logement, épargne forcée : l'acheteur se construit un patrimoine sur le long terme, alors que le locataire a l'impression de dilapider son argent en versant chaque mois un loyer... En outre, dans un contexte de taux bas où les rendements des placements financiers sans risque ont fortement chuté, tout semble pousser les particuliers à s'endetter pour devenir propriétaires.
Pourtant, la réponse à la question acheter ou louer s'avère très complexe et dépend d'un certain nombre de critères. Et si beaucoup de Français aspirent à devenir propriétaires pour le confort et un certain statut social, un achat précipité peut aboutir à une mauvaise décision patrimoniale.
Loyers et mensualités
D'un point de vue purement financier, le différentiel pour un primo-accédant sans apport entre loyer mensuel et remboursement de la mensualité d'emprunt varie fortement d'une ville à l'autre. « Quand certains écarts de prix entre l'achat ou la location vont être très dissuasifs dans d'importantes agglomérations, les prix au mètre carré de certaines villes de taille moyenne montrent qu'acheter ne coûte bien souvent pas plus cher que de louer », souligne Christine Fumagalli, présidente du réseau immobilier Orpi.
A Paris, Bordeaux et Lyon, par exemple, les prix ont proportionnellement beaucoup plus augmenté que les loyers. Le remboursement de la mensualité d'emprunt en cas d'achat coûte à peu près deux fois plus cher que le loyer pour un logement équivalent.
En revanche, à Lille et Marseille, loyer et mensualité d'emprunt sont presque équivalents. Ainsi, il faut débourser 780 euros par mois de loyer pour un appartement de 60 mètres carrés à Lille et 810 euros de mensualités d'emprunt pour acheter le même appartement (pour un primo-accédant sans apport, empruntant sur vingt ans à un taux de crédit entre 1,50 % et 1,56 % selon les villes). « A l'heure où les taux bas avantagent les emprunteurs, il est possible de profiter de l'aubaine en jouant au maximum l'effet de levier du crédit. Ainsi, à Limoges, une maison récente de 80 mètres carrés estimée à 120.000 euros se loue 660 euros par mois, montant à comparer aux 630 euros de mensualités (hors assurance) à rembourser pour un prêt sur vingt ans pour en devenir propriétaire », explique Pierre Cluzeaud, directeur d'agences Orpi.
Prendre en compte les coûts globaux
Mais si la question est de savoir quel choix est le plus rentable au bout du compte, il faut considérer les flux financiers globaux et mettre un certain nombre de paramètres financiers dans la balance. Il faut aussi bien prendre en compte tous les frais annexes (impôts, charges...). La cote du bien qui m'est proposé va-t-elle progresser plus vite que le placement des économies - par exemple sur une assurance-vie - que je réalise en restant locataire ? La variable la plus importante dans le choix d'acheter ou de louer devient alors la durée de détention du logement. Et, là aussi, la réponse dépend fortement de la ville dans laquelle on souhaite se loger.
Hypothèses de rendement et de valorisation du bien
Si on prend pour hypothèse que les prix de l'immobilier vont se valoriser de 1 % par an et l'argent placé de 1,5 % par an, il faut alors attendre 6 ans pour que l'achat soit plus rentable que la location à Bordeaux et 5 ans à Paris, Lyon, Nice, Cannes ou Aix-en-Provence (voir infographie).
Mais si l'on prend l'hypothèse que les prix vont plutôt augmenter de 3 % par an dans les années à venir à Bordeaux, Paris et Lyon, il devient plus intéressant d'acheter que de louer au bout de 4 ans à Bordeaux et 3 ans à Paris et Lyon. Enfin, si les prix n'évoluent pas, il faut alors attendre 10 ans à Bordeaux et 8 ans à Paris et à Lyon. « Il faut rester très prudent, car ce n'est pas parce que les prix ont évolué de 3 % par an ces 10 dernières années à Paris, par exemple, que la tendance va se poursuivre pour les 10 années à venir », alerte Pierre Vidal, économiste chez MeilleursAgents.
A l'inverse, si on considère des villes plus petites et beaucoup moins dynamiques comme Mulhouse, Saint-Etienne ou Limoges, il faut attendre 3 ans pour que l'achat soit plus rentable que la location dans le cas où les prix n'évoluent pas ou baissent de 1 % par an, comme cela a été le cas ces dernières années. « Sur la base d'une fixation durable dans une zone géographique sur une période de 7 à 10 ans, et selon l'historique d'appréciation du marché immobilier local, nous pouvons raisonnablement considérer que la propriété immobilière représente une stratégie pertinente face à la location en matière de coûts globaux, y compris en considérant la revente », résume Renaud Capelle, directeur immobilier adjoint de l'Union Financière de France (UFF).
Un projet de long terme
L'achat immobilier doit donc être une décision de long terme. C'est là que l'aspect purement financier du choix d'acheter ou de louer rejoint le projet de vie dans lequel il s'intègre. Car il affecte non seulement le patrimoine, mais aussi la mobilité des personnes, leur train de vie. Et dépend donc très étroitement de leur situation professionnelle, personnelle et financière - beaucoup moins stable qu'auparavant. « Aujourd'hui, on change plus souvent de métier et de région. Un salarié changera 4,5 fois de métier dans les premières années de sa vie professionnelle, selon l'Insee. Ce qui implique un besoin de mobilité et de réactivité, peu compatibles avec la sédentarisation géographique », met en garde Yannick Hamon, directeur général de MonFinancier.
Même constat pour la vie personnelle. « Si vous achetez, il faut que la taille du logement corresponde à votre situation actuelle certes, mais aussi à celle des sept à dix prochaines années. Vous n'aurez pas besoin des mêmes surfaces, si votre famille s'agrandit ou si, au contraire, vos enfants partent », avertit Christine Chiozza-Vauterin, avocat au cabinet LightHouse LHLF. C'est sans compter les cas de ruptures, divorces, recompositions familiales, qui ont explosé ces dernières années. En 15 ans, les ruptures ont augmenté de 63 % selon l'Insee.
Les délais de revente
Dans ces cas, être locataire paraît offrir plus de flexibilité et autorise plus de réactivité lors de changements de vie. Il suffit de donner son préavis au propriétaire un mois avant son départ, là où vendre son logement peut prendre du temps. Il faut en moyenne 54 jours dans les 10 plus grandes villes françaises, mais près du double (108 jours) dans celles de moins de 20.000 habitants, où le marché est beaucoup moins fluide, selon les données du réseau Guy Hoquet. Et lorsqu'on est contraint de vendre précipitamment, encore faut-il ne pas se retrouver dans un « creux de marché », comme en 2009, qui pourrait fortement dévaluer le bien.
« Une nouvelle classe de locataires »
Autant d'évolutions sociétales et professionnelles qui ont contribué à créer une « nouvelle classe de locataires », explique Fabrice Abraham, directeur général du réseau Guy Hoquet l'Immobilier. Une réticence à l'achat accentuée par les aspirations de la nouvelle génération, qui consomme l'immobilier autrement. « Beaucoup de jeunes ménages préfèrent rester locataires pour habiter au centre-ville dans les beaux quartiers plutôt qu'acheter en s'excentrant », souligne le directeur de Guy Hoquet. Ainsi, la proportion de propriétaires français reste stable dans le temps (environ un ménage sur deux, selon l'Insee), « alors que les taux de crédit immobilier au plancher permettent à bien davantage de Français de devenir propriétaires », poursuit-il.
Une sécurité du logement
D'autres critères qualitatifs pèsent dans la balance, également en faveur de l'achat. La sécurité du logement notamment. Le locataire peut en effet être exposé à une mobilité forcée à l'échéance du bail. Mais également, en cas de perte d'emploi, l'acheteur peut faire jouer son assurance de perte d'emploi (s'il s'en est assuré au moment de monter le crédit), pas le locataire. Ensuite, au-delà de toute considération financière, « dans bon nombre de villes de moins de 20.000 habitants, beaucoup de personnes se retrouvent comme obligés d'acheter tant le choix de logements à la location est limité », ajoute Fabrice Abraham.